jeudi 29 septembre 2011

Ushi ni Negai wo

Au Japon, le secteur agricole ne représente même pas 5% de la population active. Il s'y trouve victime de plaies identiques à celles qui frappent la paysannerie occidentale et ont pour conséquence le non-remplacement des agriculteurs, l'appauvrissement des campagnes, la chute potentielle de la qualité de la production et finalement la lente agonie d'une certaine culture rurale. Régulièrement, la problématique resurgit sur la place publique et redevient, pour un temps du moins, un sujet de société. Il n'était donc pas illogique qu'un drama, même récent, se penche à son tour sur la question.

Ushi ni Negai wo ose donc proposer à une audience essentiellement urbaine une série portant sur un quotidien rural auquel les téléspectateurs japonais sont logiquement de plus en plus étrangers. A cette fin, il a été imaginé de précipiter dans les campagnes nippones un groupe de jeunes étudiants tokyoïtes, plus ou moins convaincus de l'intérêt de cette expédition.

Pour dévoiler l'aspect le plus positif de cette série, les problèmes auxquels la paysannerie fait face sont clairement affichés. On pourrait évoquer, en vrac, la concurrence des pays en voie de développement sur les matières alimentaires, l'inflation des coûts et l'endettement galopant qui ne sont pas compensés du fait de la faiblesse des prix, le non-renouvellement de la main d'oeuvre partie chercher du travail et une vie moins rude à la ville, les politiques agricoles décourageantes pour ceux qui ont leur métier à cœur, etc. La liste est malheureusement longue et elle ne sonnera pas étrangement aux oreilles occidentales, tant il est vrai que ces difficultés se retrouvent à l'identique dans nos propres campagnes. On note que la réalisation, malgré, semble-t-il, quelques erreurs typiques de citadins, s'est évertuée à montrer une vision "réaliste" de la campagne japonaise, où la rudesse du travail des champs s'équilibre avec un outil agricole résolument moderne: malgré l'âge de ses actifs, l'agriculture japonaise de ce nouveau millénaire n'est en effet pas celle de l'ère Shōwa. Ushi ni Negai wo tente également de montrer les mérites de cette vie difficile mais saine et des valeurs de la culture rurale. L'ambition avouée du drama n'est en effet autre que de convaincre les étudiants précités, et par là les téléspectateurs, que l'agriculture japonaise a encore un avenir sur lequel la jeunesse peut miser.

Chacun des six étudiants incarne l'une des postures que les jeunes du XXIème siècle peuvent avoir vis-à-vis de l'agriculture. Tohei (Koide Keisuke) étudie sérieusement pour jouer un rôle dans l'avenir de l'agriculture nippone, mais son intérêt est plus politique que sentimental. Kazumi (Toda Erika) est la gourdasse de service affublée d'une vision romantique de la vie à la campagne. La belle Mihoko (Karina) incarne la pure citadine, inséparable de ses hauts talons et de son gsm, et qui, en conséquence, se moque éperdument de la campagne, de ce qui s'y passe et de son devenir. Ayaka (Aibu Saki) est la seconde cruchonne de service, un peu là par hasard et principalement préoccupée par ses histoires de cœur. Ryuta (Nakata Atsuhiko) est... juste un mec bizarre. Reste enfin Takashi (Tamayama Tetsuji), le chouchou des téléspectatrices japonaises, et, en l'occurrence, des habitants de son village natal où se joue l'histoire. Son rôle, un peu plus étoffé que celui de ses comparses, est celui d'une jeune homme pris entre les espoirs d'une population vieillissante et sa perception que l'agriculture nippone se trouve au-delà de tout salut. Les rôles étant ainsi donnés, globalement, tous ces personnages donneront une vision assez simplistes de la jeunesse japonaise. C'est assez paradoxal, de la part d'une série qui cherche à démystifier les campagnes, de s'égarer régulièrement dans la caricature de ces protagonistes venus de la ville. Probablement pour appâter le chaland de moins de 30 ans, en sus du casting, les réalisateurs d'Ushi ni Negai wo se sont attachés à respecter un cahier des charges défini dès le sous-titre de la série: "Love and Farm". Avec ça, nous voilà bien. Pour que ce soit clair et net, les aspects romantiques de ce drama s'avèrent totalement superfétatoires, voire contre-productifs puisqu'ils appuient la tentation caricaturale que j'évoquais plus haut. Dommage.

On ne peut quand même pas retirer à cette série le mérite de se pencher, non sans intelligence et un peu d'humour, sur un phénomène de société finalement peu porté sur les écrans. Un sujet tellement rare d'ailleurs que, pour une fois, je vais me permettre une recommandation à ceux qui souhaiteraient en apprendre davantage, mais de façon toujours ludique, en conseillant la lecture d'un manga informatif paru en France, chez Delcourt, Les Fils de la terre. Les autres pourront se contenter de jeter un œil sur ce drama et de toujours profiter d'un bol d'air pur, loin du décor habituel de la mégapole tokyoïte.


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6/10 : That wasn’t too bad, I guess. But never worth a rewatch.



The complete details about Ushi ni Negai wo on drama-wiki
Ushi ni Negai wo with English subs

2 commentaires:

Katzina a dit…

J'ai dû voir plusieurs fois le nom de ce drama - vu le casting pas étonnant - mais le sous-titre étant hyper rébarbatif je n'avais jamais cherché à en savoir plus, encore moins à le regarder.
Etant moi-même une fille de la campagne d'une famille d'agriculteurs, je suis assez sensible à ce genre de sujet, y compris quand il concerne le Japon. La présence de Tamayama Testsuji ravira mon côté fangirl et m'aidera certainement à passer outre les clichés de la romance ^^.

Asa a dit…

Je plaide non-coupable. Je n'avais pas vu le sous-titre avant de regarder cette série. Cela dit, ça reste très supportable.
Pour ce qui est de l'agriculture, je ne crois pas que ce soit toujours bien réaliste pour des connaisseurs de la vie rurale, mais je me suis plus attaché au fond du message - quel avenir pour le monde agricole? - qu'à sa forme.